Rihanna - Stay (2013) vs. Britney Spears - Everytime (2004)
Ce qui est bien avec le capitalisme, c'est sa durée de vie.
On pourrait croire que les consommateurs sont intelligents, et qu'ils se souviennent vaguement qu'on leur a vendu un produit la veille... Pas du tout ! Et l'industrie du clip est là pour nous le rappeler.
Il y a quelques mois, Rihanna nous gratifiait d'un clip-baignoire. Le concept est simple : pour chanter une chanson d'amour, c'est mieux d'être à poil, si possible dans une eau saumâtre pour qu'on voit un peu, beaucoup, mais quand même pas tout. Quand j'ai vu le clip la première fois, mon cerveau-base-de-donnée-voiture-poubelle-du-web a fait "tilt" : La Britney avait déjà chanté dans une baignoire. Simplement, elle attendait 2'06" pour retirer son débardeur, alors que Riri attend 4 secondes. Et oui, un produit, quand il est réchauffé, ça se doit d'être un peu plus percutant. Exit les préliminaires (un peu chiants, d'ailleurs, de La Britney).
(oh mais c'est fou ce changement, ils ont oser passer de la main gauche à la main droite)
Si on vous faisait le même coup pour acheter vos yaourts dans un supermarché, vous vous diriez "la vache, les salauds, ils ont juste changé le packaging, mais c'est deux fois plus chers". Et c'est là que la magie de l'entertainment opère : ça marche ! (pour la simple et bonne raison que la ficelle ultime, c'est d'espérer voir un bout de seins ou de fesses d'une jolie fille, même si le clip de La Britney était trop-top-intelligent-et-spirituel-dans-le-desespoir-de-la-vie-amoureuse-avec-Le-Kev-et-des-méchants-paparazzis).
Élargissons le propos. Personne ne s'est attelé à comparer les carrières musicales de Britney Spears, Christina Aguilera et Rihanna, sur un point précis (peut-être parce que tout le monde s'en fout à part moi) : le passage de la lolita inoffensive à la biatch bien sexy. Et pourtant, à quelques années de distance, on nous a refait exactement le même coup.
Britney Spears : "I'm not a girl, not yet a woman" (2002), ou comment on passe des petites couettes de "Baby one more time" (1998) au très explicite "I'm a slave 4 you" (2001) en l'espace de trois ans. Message clair à toutes les adolescentes américaines et du monde : pour devenir une femme, il faut devenir une p***.
Christina Aguilera, dont la carrière était clairement indexée sur celle de La Britney (même si elle, elle sait chanter en live), lui emboîta le pas. Alors que sa carrière, jusque là, plafonnait un peu (tout est relatif), elle créa l'événement, en paradant sur un ring de boxe avec des méchants rappeurs dans un clip qui, à l'époque, fit sensation : jusqu'où pouvait-on aller en terme de dévergondage et de pantalon en cuir de cowboy ?
Rassurez-vous, quelques années plus tard, tout ça est oublié, et Rihanna peut donc donner pour titre à un de ses albums Goog Girl gone bad (2007). Tout cela est finalement très jungien (de Carl Gustav Jung) et joue sur l'archétype - ô combien intelligent - de la gentille fille propre sur elle qui finit par devenir un objet de désir sexuel.
Il ne faut pas trop s'en faire : ça ne nous renseigne pas, finalement, sur l'amnésie collective, mais sur les segments d'adolescent auxquels les marketeux espèrent vendre leur daube. Attendons donc (2007 - 2001 = 6 ans + 2007 = 2013), soit cette année, pour voir une nouvelle gentille fille devenir une "femme" selon les canons du capitalisme musical.
Tiens, faut que je fasse un article sur Lana del Rey :-)