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La décharge des clips du web intergalactique
5 novembre 2013

Le porno-chic

A l'aube des années 2000, tout le monde savait ce que "techno" voulait dire. Techno, ça voulait dire porter des treillis, aller dans des "teufs", avec des piercings sur la casquette, avoir un chien et niquer le système. Fallait faire "peuter" le "sound-system" à gros coup de BPM, pour se retourner la tête. Mais en même temps, la "techno", ça voulait aussi dire s'habiller en Ralph Lauren, se tenir le col en V en se déhanchant sur du Carl Cox.

Et puis, comme tout style musical, la techno a été investi par les capitaux monopolistiques (R. Hilferding) et a péréclité comme une sombre marque de brandade de morue. C'était le moment où Daniel Vaillant (le maire du 18ème arrondissement et, à l'époque, ministre de l'intérieur) avait décidé d'inventer le premier effet Barbara Streisand : en voulant contrôler les teufs, ils les avaient rendu populaires, et donc, de facto, il en a tué l'esprit pour de vrai. Dani, tu déconnes. Il y avait plus de gens à l'aéroport de Marigny qu'à un concert de Pascal Obispo

Bref, du coup, le pognon s'en est mêlé. Et a investi massivement dans la techno, comme il le fait aujourd'hui avec le rap, pour pouvoir espérer le vendre chez Leclerc. Il faut dire que Moby, qui faisait de la "goa-trance" dans les années 1994, avait déjà montré l'exemple, en vendant ses miches à la pop-rock. Cependant, vendre la techno, c'était plus dur que prévu et le capital se décida à utiliser son arme la plus complexe : les femmes à poil. Il se trouve que, pour la première fois dans l'histoire du clip, ô combien riche, un style à part se détacha de la source musicale dont il était issu, pour devenir un vrai phénomène culturel clipistique à lui seul : le porno-chic. Le principe est simple : comme on vend de la musique de merd*, autant foutre que des filles à poil. Comme dans le rap, mais sans voiture, sans armes, sans drogue et sans violence. Juste des femmes à poil, dans des hôtels de luxe, qui boivent des cocktails et portent des maillots de bain très chers.

Evidemment, le phénomène avait déjà été consubstantiellement lié à l'euro-dance des années 1992-1996. Mais si ! Rappelez-vous les tubes endiablés de Twenty Fingers, qui changeait de "chanteuses" comme on change de kebab. Après Short dick man, il y eut Lick it, avant que Sex Machine n'enterre le tout en 1994. La vache, en rematant le clip, on dirait du Joséphine Jo. Bref : ça restait des codes parmi d'autres, alors qu'avec la vague porno chic des années 2000, il ne restait plus que ça. 

Tout a commencé avec le tube intersidéral de Benny Benassi, Satisfaction (2003). Il y posait tous les impondérables du genre : des nanas maigres et bien roulées, en très petites tenues, qui dansent sur un air débile et de préférence sur un fond d'une seule couleur. Ce fut une révolution. En quelle mesure avait-il plagié notre Alain Chabat national avec ses Bricol' Girls ? Personne ne le sait.

Par la suite, le style a essaimé. Alex Gaudino avec Destination Calabria marqua sans conteste un point important. La multiplication des filles, la mise en série du spectacle, jouait pour le succès. Tim Deluxe, avec son tube explicite Moins de parole, plus d'action, joua la fibre sportive, que reprit à son compte Eric Pridz dans le mémorable Call on me (qui jouait sur un combo-porno-chic-back dans les années 1980'). Les derniers épigones - parmi tant - furent des gens comme Alexandra Stan, qui, pour avoir dansé deux minutes habillée en flic, totalisa 200 millions de views sur Youtube, avant de se faire cogner par son roumain de mari. Le tour d'horizon ne serait pas complet si on ne parlait pas de Miley Cyrus, odieux furoncle posé sur la pop mondiale, qui fait du porno-chic, avec porno, mais sans chic. Tout ce qu'elle sait faire, c'est tirer son immenssssse langue.

Reste à dire une chose. Le style du porno-chic, grosse greffe du capitalisme moribond, a particulièrement bien pris dans certains pays : par exemple en Russie. Sur les ruines du communisme et dans un pays où il n'est pas rare de croiser un homme avec une rose (avant qu'il ait réussi à épouser l'être aimé et à se détruire par l'alcool), DJ Smash a repris le flambeau du porno-chic. D'abord avec le tub interstellaire Volna (Волна). Le plagiat officiel de Alex Gaudino y est patent : mais ça marche. Dans Moscow never sleep (Москва я люблю тебя), on n'est plus du tout dans le chic : il ne reste que le porno. Merci les Slaves. La polysémie des meufs à poil a conquis l'Empire du milieu.

Bon, heureusement, de la techno, il reste Karlit et Kabok. Et merde.

PS : Ok, tu as gagné mon pote, le premier clip porno chic français, c'était Silmarils, Cours Vite. 1995, mec. Et ouais.

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Commentaires
Z
Putain on se croirait de retour au lycée, c'est moche..Sur le lien youtube de Moscow never sleeps c'est traduit never SLIPS par nos amis russes (un message subliminal ?)
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La décharge des clips du web intergalactique
  • Avant Youtube, il y avait MTV. J'ai regardé tous les clips de l'histoire du monde et au lieu de pourrir mon entourage avec mes avis sur la question, je vais vous pourrir VOUS. Comme une soirée Youtube sans fin...
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